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Veni, Vidi, "Scribi"
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3 juin 2008

Somewhere over...

Foulant cet humus avec humilité, j'oublie les géométries acides du monde figé, celui d'où je viens, celui que je fuis, celui à qui on attribue toute l'oppulence et la puissance du monde. Le territoire portant l'aboutissement des plus grands hommes en son sein: l'Europe. J'aime l'Europe. Mais encore, qu'est-ce que l'Europe? Vous êtes-vous déjà posé la question? Qu'est-ce que cette entité que l'on appelle Europe? Certains auront en tête l'Europe politique, d'autres une vision floue de "limites" incertaines...quelque part à l'Est... puidqu'ailleurs, les eaux ont fait leur travail.

L'Europe, au fond, n'existe pas. Là où l'on s'avance à parler d'Europe, il n'y a rien qui puisse la qualifier comme telle. Il s'agit d'une illusion. Une illusion qui berne le monde depuis plusieurs siècles. Cest celui qui berce mon identité, mes valeurs, mon nom, mais où je n'ai jamais trouvé les richesses dont le monde entier parle si souvent. A vrai dire, j'ai vite compris que nous parlions pas des mêmes ressources.
Je suis née en Suisse, pays brodé d'un relief généreux, aux éblouissants détails paysagers. La Suisse, c'est, dans l'imaginaire collectif du monde entier, les banques, les coucous et le chocolat. Le citoyen suisse est, par définition, un millionaire malheureux, car doté d'un accent peu séduisant et incapable de contact social inclusif et extraverti. Son seul soutien: son argent.
L'argent, j'en ai un peu... mais on dira que j'en ai surtout besoin. C'est une richesse relative. On s'en sert pour s'acheter des vêtements, de la nourriture, un appareil photo, une vie, une formation, une place dans ce monde. L'argent demeure à la fois la cause ainsi que le résultat de la destruction de la vraie richesse, celle qu'on aperçoit dans le partage d'un thé à la menthe dans une tribu berbère. Je suis ainsi partie. J'ai fait mes bagages, emporté mes idées, observé une dernière fois Genève, paysage cristallisé dans le béton, de derrière le vitrage du terminal 13.

Je ferme les yeux. Je rêve. Un air à l'odeur de clim' glisse vers le fond de ma gorge, assèche la chair, s'engouffre dans mes entrailles et remonte par la trachée, réchauffé et humide, pour finir sa course dans l'air froid et sec de la cabine pressurisé du vol 1440B pour Miami. Dans 4h, je prendrai mon dernier avion pour voler vers la terre sacrée, capitale: San José.

Là-bas, tout meurt, tout revit. Le paysage se meut sous mes yeux au rythme de la vie. Chez moi, le vent n'a d'effet que dans les cheveux et dans le coeur. Ici, tout frissone sous les caresses du souffle du monde: les nuages s'égarent contre les volcans et les karsts brisés; les branchages des versants inondés de forêts mènent leurs vains combats face à l'air et les herbes dansent en ondulant leur tige dans les quelques plaines du centre du pays. Il n'y a ici de statique que le soleil, fixé pour toujours au zénith. Il fait chaud et dans mon coeur, je pleure. Je pleure tout ce que d'autres, derrière l'Atlantique, ne verront jamais. Je pleure ma joie. Je donne à cette terre mon eau, la vie, ma reconnaissance, des larmes.

Je foule la poussière de ce lopin d'humanité scerné par le Pacifique d'un côté et la mer des Caraïbes de l'autre. Je suis scernée. Tout est beau ici: l'océan, les rues villageoises, les paysages tropicaux et volcaniques. On ne regrette rien lorsqu'on marche sous la pluie hivernale du Costa Rica. Le soleil fait son travail, il nous redore l'esprit...

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